Tout est parti d’une proposition un peu folle (et complètement naïve) balancée après quelques verres de vin. « Puisqu’on ne trouve pas vraiment ce que l’on souhaite pour les tenues de demoiselles d’honneur, qu’est-ce que tu dirais que je les couse moi-même en fonction des désidératas des filles ? »
Après l’euphorie partagée de l’annonce, s’entame alors une longue quête des modèles parfaits qui accompagneront les filles. Je voulais vraiment que chacune y trouve son compte, que chacune se sente belle, élégante tout en gardant le confort comme critère principal. Je cherchais pour chacune le modèle qui mettrait leurs atouts en valeur et dissimulerait ce qu’elles aimaient moins.
Manon souhaitait une combinaison plutôt qu’une robe, parce que cela correspondait davantage à son style et ses goûts personnels. Elle préférait une encolure plutôt dégagée, mettant subtilement le décolleté en valeur. Et des manches longues, pour le confort et la chaleur d’un mariage hivernal.
Laure visait d’emblée une robe cache-cœur parce que c’était un modèle qu’elle connaissait bien et qui mettait parfaitement sa morphologie en valeur. Dans une longueur cheville pour la touche d’élégance et de nouveau, idéal pour un mariage hivernal.
Camille, plus à l’aise avec une encolure ras de cou, souhaitait plutôt un décolleté dans le dos, histoire d’apporter un peu de frivolité à un modèle relativement sage de prime abord. Elle partait initialement sur une longueur cheville, avant d’opter finalement pour une longueur midi, assez en vogue ces dernières années.
Quant à moi, éternelle indécise, je ne savais pas vraiment ce que je voulais. L’adage selon lequel les cordonniers sont les plus mal chaussés n’est définitivement pas un mythe. J’ai longtemps privilégié une robe midi, resserrée à la taille, avec décolleté et manches kimono. Et puis, quand j’ai passé le prototype de Manon, ça m’a semblé évident que ce modèle me convenait mieux. Portant des pantalons, des salopettes et des combinaisons environ 300 jours/an, je me suis dit que je m’y sentirais plus à l’aise que dans une robe. Et comme la journée/soirée/nuit s’annonçait longue, c’était un critère des plus importants.
La wonder-combinaison

C’est pour ce modèle que la quête s’est avérée la plus longue. Je trouve que l’offre de patrons de combinaisons est relativement pauvre. En général, ce sont toujours les mêmes modèles que l’on retrouve : souvent des manches courtes, souvent un pantalon resserré dans le bas, style coupe carotte (alors que l’on cherchait plutôt des jambes larges), et souvent un style plutôt casual là où nous souhaitions conserver un côté apprêté, plus approprié pour un mariage. C’est finalement chez la marque londonienne de patrons Sew Love Patterns que nous avons trouvé notre compte, avec le modèle Springe. Elle cochait toutes les cases de Manon. Et cerise sur le gâteau : c’était également un coup de cœur immédiat pour Coco et moi (bin oui, c’était mieux d’avoir l’aval de la mariée aussi !). La seule ombre au tableau me concernant, c’était que du coup, le patron et les explications étaient en anglais (grande première pour moi) et que les finitions semblaient un peu complexes. D’un autre côté, comme il était évident que je ferais un prototype pour chaque modèle avant de me lancer tête baissée dans les modèles définitifs, je pouvais me permettre de relever de nouveaux défis, de rater, de recommencer. C’est finalement ce qui rend l’expérience si excitante ! Alors ni une, ni deux, je me suis lancée, et qu’est-ce que j’ai bien fait. Au final, même si le modèle est un peu long et complexe, les explications sont si détaillées et si précises qu’il est presque impossible de se louper. On respire un grand coup, on lit et relit les explications avant de se lancer, et surtout on fait une pause quand on sent la fatigue pointer le bout de son nez, sinon gare aux erreurs qui nous coûteront plusieurs heures de travail.




Le patron, qui offre une gamme de tailles assez large, allant du 32 au 46, est vraiment bien coupé, de sorte que je n’ai dû faire aucune adaptation (si ce n’est la longueur de l’ourlet des jambes de pantalon). Il flatte aussi bien les silhouettes taillées en V que les H (ou les X évidemment). Avec ses jambes larges et ses diverses pinces placées de part et d’autres de la taille, il affine la silhouette en tout allongeant les jambes de manière assez hallucinante. Proposé initialement avec des manches courtes, le patron a par la suite été adapté par Johanna, la créatrice de la marque, afin d’offrir une extension avec des manches longues très larges, resserrées au niveau des poignets (selon deux possibilités : un élastique ou un bracelet de manche). Pour l’occasion, on a opté pour les bracelets de manches qui nous semblaient plus sophistiqués.
L’élégante robe ouverte dans le dos

Connaissant les préférences de Camille pour le col rond et le dos ouvert, le choix du patron s’est rapidement imposé. Je connaissais de nom le patron Negara de la marque Pretty Mercerie qui est un modèle que l’on retrouve régulièrement sur les comptes Instagram des couturières, mais je n’avais encore jamais eu l’occasion de le tester. Pour coller totalement aux attentes de Camille, j’ai complètement revu les manches. Le modèle proposait normalement des manches ballons qui ne convenaient pas vraiment ni à Camille, ni à Coco (ni à moi d’ailleurs). J’ai donc reconstruit totalement une manche normale, que j’ai ensuite ouverte selon des encoches régulières afin de créer des manches papillons (ce sont des manches qui sont ‘normales’ au niveau des épaules, mais qui s’élargissent ensuite pour former une sorte de cloche).






Pour la longueur de la jupe, rien de plus simple : le patron propose normalement une longueur mi-cuisse, je l’ai tout simplement rallongée selon la longueur désirée en prolongeant les lignes existantes. La coupe étant patineuse, en la rallongeant, cela nous permettait d’obtenir un joli jeu de plis. Avant de me lancer, j’avais lu quelques retours sur le net faisant souvent état du même défaut : le dos avait tendance à bâiller. C’est effectivement ce qui s’est produit dans le cas de Camille. La taille au niveau de la poitrine ET de la taille convenaient parfaitement de sorte qu’il aurait été inutile de tenter de coudre la taille inférieure, pourtant l’ouverture dans le dos bâillait très clairement. Pour y remédier, la marque proposait d’ajouter des pinces dans le dos. Je ne l’ai pas fait, en revanche, comme il y a un petit bouton qui permet de fermer la robe au niveau de la nuque, j’ai reculé le bouton et la boutonnière et j’ai également pris une marge de couture plus grande au niveau du zip du dos.
Nota bene : depuis le mariage, j’ai constaté que la marque a revu et corrigé certains de ses patrons phares. C’est le cas de la robe Negara. Si vous achetez le patron aujourd’hui, il est donc possible que le problème soit résolu.
L’intemporelle robe cache-cœur

Pour Laure également, le modèle s’est rapidement imposé. Désirant une longue robe cache-cœur, le patron Aime Comme Mots Doux de la marque Aime Comme Marie correspondait en tous points à ses attentes. Pour les aficionados de la marque française Sézane, c’est une coupe qui ressemble énormément au modèle Mae. En effet, on retrouve même les mêmes jeux de fronce juste en-dessous de la ligne d’épaule. Des trois tenues, c’était clairement celle qui me paraissait la plus facile, simple et rapide à coudre. Et pourtant, c’est celle qui, au final, m’a donné le plus de fil à retordre ! En effet, je pense que c’est un patron qui convient vraiment bien aux petites poitrines, mais dès lors que ce n’est pas le cas, le patron montre des signes de faiblesse. Quand on grimpe dans les tailles, au lieu de couvrir un tour de poitrine plus généreux, c’est surtout la taille de la carrure qui se voit drastiquement augmentée. Si bien que dans le cas de Laure, la ligne d’emmanchure tombait beaucoup trop bas par rapport à son épaule. Il a fallu rattraper le coup en modifiant considérablement le dos et en redessinant quasiment totalement la forme de la manche. Pas une mince affaire, donc !



Nota bene : si vous vous lancez dans la couture d’un patron de cette marque, faites bien attention au fait que les valeurs de couture ne sont pas incluses et doivent systématiquement être ajoutées !
Le tissu



Une des premières requêtes de Coco était la couleur. Pour le reste, on choisissait ce que l’on voulait, mais elle tenait à une chose : un tissu couleur sauge/vert de gris, pour coller au thème du mariage hivernal. De mon côté, vu les modèles désirés par les filles, il nous fallait un tissu très fluide et très léger, mais avec un peu de tenue tout de même. Un tissu qui offrait le beau drapé nécessaire à la jupe de Camille, mais qui permettait aussi de réaliser facilement de jolies fronces pour notre combinaison et la robe de Laure. Si dans un premier temps, on avait pensé à une double gaze de coton chez Les Tissus du Chien Vert, notre choix définitif s’est finalement porté sur un très beau crêpe de viscose parsemé de tous petits motifs dorés irisés de chez Cousette. Le tissu était idéal pour ce genre de réalisation : suffisamment léger pour obtenir le tombé souhaité, mais ne laissant aucune place à une transparence redoutée.




Je sais que cet article était attendu par une partie d’entre vous, alors j’espère avoir répondu à la plupart de vos questions. Si ce n’est pas le cas ou si vous souhaitez me laisser un petit mot, n’hésitez pas à m’écrire un commentaire ci-dessous, je me ferai une joie d’y répondre !
Couturièrement vôtre,
Charlie
Toutes les photos sont de la talentueuse Elodie Deceuninck.